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Manuel d’économie politique de l’Académie des sciences de l’URSS 

(Tome 2) [ 1955]

 

Les deux formes de proprietes socialistes

 

Dans la première phase du communisme, la propriété collective socialiste revêt deux formes : 1) la forme de la propriété d’État, et 2) la forme de la propriété coopérative-kolkhozienne. La propriété socialiste d’État est celle du peuple tout entier représenté par l’État socialiste des ouvriers et des paysans. La propriété socialiste coopérative-kolkhozienne est celle des différents kolkhoz et associations coopératives.

 

 

 

 ( Note de lecture : 

 

La deuxième édition du Manuel d’Economie Politique de l’URSS date de 1955. Staline meurt en 53. Dans la légende forgée par la mouvance stalinienne, il y aurait eu déformation de la pensée de Staline par les scientifiques, notamment les économistes, qui ont écrit après sa disparition, s’adonnant au nouveau cours politique.

 

Au cœur de cette légende se tient le concept « d’Etat du Peuple tout entier », ce concept serait d’après cette mouvance non pas un concept forgé par Staline, mais une idée réformiste introduite par le groupe opportuniste khrouchtchévien. Nous avons montré, textes en mains, que la représentation de l’URSS comme une société où la conflictualité de classe a disparu, n’est pas une représentation née dans la tête de ce nouveau courant, mais qu’il ne fait que reprendre une représentation du monde que Staline avait forgée pour introduire sa réforme constitutionnelle de 1936, représentation confirmée dans le  rapport au comité central de 1939. (Voir « Les Questions du Léninisme » et notre texte : « Lire Staline aujourd’hui parties 1et 2 ») C’est dans le texte justifiant la constitution de 1936 que Staline assoit sa définition centrisme de l’URSS comme une société où la lutte des classes a disparu, mais où l’Etat est maintenu. C’est dans ce texte qu’il renonce à l’analyse marxiste des classes sociales au profit d’un classement sociologique en catégories sociales. Savoir : les paysans, les intellectuels, les ouvriers.

 

Ces groupes sociologiques ne se livrant plus à une lutte de classes, mais à une coopération sans conflictualité majeure d’intérêts. Dès lors l’Etat que Staline continue d’encenser et de justifier dans l’histoire de l’URSS, n’est plus le produit d’une conflictualité et d’une domination, mais le résultat d’un besoin de gestion et d’administration pour parfaire une harmonie sociale.

Cette thèse est précisément celle que défend l’idéologie bourgeoise pour parler de la société capitaliste, société dont elle dénie le caractère de classe, pour en faire éventuellement une société de classements, classements qui peuvent générer de la conflictualité non-antagoniste (thèse social-démocrate).

Ce qui caractérise la représentation bourgeoise comme la représentation social-démocrate, c’est que l’Etat n’est pas un instrument de domination de classe, mais un pur instrument de gestion au service de chacun de ses citoyens, c’est précisément la thèse que reprend Staline, or cette thèse s’oppose totalement à celle de Marx mais aussi à tout un pan des œuvres de Lénine qui font de l’Etat et de son existence la preuve absolue du maintien d’une conflictualité de classe. Marx et Lénine font de l’existence de l’Etat, la marque irréfutable du maintien d’une bourgeoisie, reste à préciser laquelle.

 

Pourquoi prendre ce chapitre du manuel alors qu’il fait redite par rapport au précis de 1972 de Léontieff que nous avons déjà analysé sur ce site. Parce qu’un siècle après la révolution d’Octobre, l’heure du bilan doit sonner, l’heure du dénouement des problèmes doit arriver, et pour nous Staline est le problème. C’est lui qui a eu la direction de l’Etat Soviétique, c’est lui qui a conduit le socialisme à s’enliser, par sa déformation du marxisme. Aucun des auteurs socialistes ne peut échapper à la critique, et sur notre site aucun des auteurs n'y échappent, mais ce qui est traces de questions mal posées chez Marx et Engels, de tentatives de résolutions mal engagées chez Lénine, Trotski, Boukharine, Zinoviev etc.devient avec Staline : crimes d’Etat, les millions de morts c’est aussi le résultat de cette déformation du marxisme.

 

- Après tout, qu’il soit le représentant de la bourgeoisie rouge, n’aurait pu être qu’un épiphénomène dans la longue histoire des sociétés de classes, la domination de classe a toujours existé et avant celle-ci dans les sociétés primitives c’était la force brute sans aucune protection qui dominait. Cependant, à la différence de Lénine, il ne s’est pas contenté de supporter ce phénomène pour éviter l'effondrement du pays, il l’a développé jusqu’à sa forme suprême, celle d’une dictature sans retenue. Il a servi les intérêts d’une classe et celle-ci n’était pas la classe ouvrière.

 

C’est pourquoi l’analyse de cette société reste aussi essentielle, elle doit être disséquée avec la même force que le socialisme bourgeois adaptatif de l’Ouest-Européen. Le socialisme d’Etat de l’Est s’est révélé être le dernier barrage face au communisme et c’est pourquoi il a pris la forme d’une violence extrême.)

 

 

À ces deux formes de propriété socialiste correspondent deux types d’entreprises socialistes :

 

1) les entreprises d’État (fabriques, usines, sovkhoz, S.M.T., etc.),

et 2) les entreprises coopératives ou collectives (kolkhoz, artels d’artisans, coopératives de consommation).

 

L’existence de deux formes de propriété socialiste tient aux conditions historiques dans lesquelles se produisent la révolution prolétarienne et la construction du communisme. Après avoir conquis le pouvoir politique, la classe ouvrière trouve devant elle différentes formes de propriété privée historiquement constituées : d’une part, la grande propriété capitaliste, fondée sur l’exploitation du travail d’autrui ; d’autre part, la petite propriété privée des paysans et des artisans, fondée sur leur travail personnel. Au cours de la révolution socialiste, la grande propriété capitaliste est expropriée et passe aux mains de l’État socialiste. Ainsi apparaît la propriété socialiste d’État (bien du peuple tout entier). Mais le programme du communisme scientifique repousse comme un acte hostile et criminel l’expropriation des paysans et des artisans. Les petits et les moyens producteurs de marchandises s’associent de leur plein gré pour former des coopératives de production : kolkhoz, coopératives artisanales, et la propriété de leurs principaux moyens de production est socialisée sur des bases coopératives. Ainsi apparaît la propriété coopérative et kolkhozienne.

L’existence de deux formes de propriété sociale est donc une nécessité objective ; elle marque les deux voies différentes par lesquelles la classe ouvrière et la paysannerie viennent au socialisme, puis au communisme.

L’une et l’autre des deux classes qui existent en U.R.S.S. bâtissent le socialisme, font partie du système de l’économie socialiste. Mais la classe ouvrière est rattachée par son travail à la propriété socialiste de l’État (bien du peuple tout entier), et la paysannerie kolkhozienne à la propriété coopérative-kolkhozienne qui appartient aux kolkhoz et aux associations coopératives-kolkhoziennes. Ce sont ces liens avec des formes différentes de propriété socialiste qui déterminent au premier chef la situation différente de ces classes. Ceci détermine aussi une certaine différence entre les voies de leur développement ultérieur.

Leur développement a ceci de commun que ces deux classes évoluent vers le communisme.

V. Molotov, La Constitution du socialisme : Articles et discours, p. 267, 1937 (éd. russe).

En U.R.S.S., la terre, le sous-sol, les eaux, les forêts, les usines, les fabriques, les mines, les chemins de fer, les transports par eau et par air, les banques, les P.T.T., les grandes entreprises agricoles organisées par l’État (sovkhoz, stations de machines et de tracteurs, etc.), les établissements de commerce et de stockage appartenant à l’État, ainsi que les entreprises municipales et la masse des habitations dans les villes et les agglomérations industrielles, sont la propriété de l’État.

Le territoire de l’U.R.S.S. a 22,4 millions de kilomètres carrés, couvrant le sixième des terres émergées. Plus du quart de cette superficie, plus de 600 millions d’hectares, se prête à l’agriculture ; 700 millions d’hectares sont couverts de forêts.

L’U.R.S.S. possède les gisements de minéraux utiles les plus riches du monde. Le système socialiste d’économie a fait apparaître des richesses restées inutilisées dans la Russie des tsars. L’Union soviétique s’inscrit à la première place dans le monde par ses réserves de minerai de fer, de pétrole, de sels potassiques, d’apatites, de tourbe et d’un certain nombre d’autres minéraux utiles importants ; elle occupe la deuxième place par ses réserves de houille.

200 000 entreprises de l’industrie d’État, l’ensemble du réseau ferroviaire, les transports par eau, les entreprises d’État dans l’agriculture : plus de 5 000 sovkhoz, près de 9 000 stations de machines et de tracteurs et des milliers d’entreprises agricoles annexes sont le patrimoine du peuple tout entier.

Il en va de même pour les milliers d’établissements commerciaux de l’État. De nombreux établissements scientifiques et culturels appartiennent également à l’État.

La propriété socialiste d’État, née de la nationalisation des fabriques, des usines, des moyens de transport, etc., s’est prodigieusement accrue durant les années de l’édification socialiste grâce à l’effort du peuple soviétique. C’est ainsi qu’en 1954 les fonds fixes de l’industrie étaient 24 fois plus élevés qu’en 1913.

 

(Note de lecture :

Nous sommes ici au cœur de la contradiction du léninisme poussée à la déformation absolue par le stalinisme.

 

« La classe ouvrière conquière le pouvoir d’Etat » :

 

Qu’est-ce que cela veut dire concrètement ? Un « ouvrier » (i.e : un travailleur manuel exploité) « s’empare » de « l’Etat », autrement dit, il incarne lui-même « l’Etat » ?  Est-ce que cette nouvelle réalité est contenue dans son geste de producteur exploité ? Ou bien alors, Est-ce que par sa victoire "politique" il changerait de statut, il deviendrait « fonctionnaire » ?

 

Dans la réalité historique de l’URSS, l’entreprise a continué d’exister avec des salariés qui touchaient un salaire, cela veut dire qu’il y a eu maintien d’un effet « valeur », d’autre part le fonctionnariat et les ministères ont continué d’exister, le corps des fonctionnaires a continué de les faire fonctionner et c’est bien eux qui ont « géré » l’Etat, sont-ils devenus entre temps des « ouvriers » ? Toutes ces explications de l’Etat « Ouvrier » ne tiennent absolument pas la route. Il y a là un florilège d’inepties explicatives ou d’insuffisance d’analyse des contradictions du maintien d’un Etat sous le socialisme. Et on le voit mieux dans la suite du texte.)

 

La propriété socialiste d’État se distingue foncièrement de la propriété d’État capitaliste. Lorsque telles ou telles entreprises, ou même des branches entières de l’économie deviennent la propriété de l’État bourgeois, leur nature sociale ne change pas pour autant. L’État bourgeois contemporain représente les intérêts du capital monopoliste et est entre les mains de celui-ci un appareil de violence qui permet à la minorité possédante d’opprimer la majorité laborieuse. C’est pourquoi les entreprises de l’État capitaliste sont, elles aussi, fondées sur l’exploitation des travailleurs et s’opposent au peuple comme une force qui lui est étrangère et l’asservit.

Dans la société socialiste, ce sont les travailleurs avec à leur tête la classe ouvrière qui sont au pouvoir. Ils possèdent les moyens de production. Dans les entreprises socialistes, la force de travail n’est pas une marchandise, car les travailleurs, détenteurs des moyens de production, ne peuvent se vendre à eux-mêmes leur force de travail. Toute possibilité d’exploitation de l’homme par l’homme est donc exclue dans les entreprises socialistes.

 

( Note de lecture : 

 

Ici, dans ce court extrait, on est au cœur de la contradiction.

« La propriété socialiste d’Etat se distingue foncièrement de la propriété d’Etat capitaliste » Comment cela et où cela ? La phrase est une assertion ce n’est pas une démonstration.

Pour distinguer l’Etat capitaliste de l’Etat socialiste, les auteurs affirment qu’il y aurait un caractère « social » de tout Etat.

 

Certes, mais qu’est-ce qu’un prétendu caractère « social » d’un Etat qui ne concerne pas l’Etat dans son mode de fonctionnement même.

 

Quel est la nature du statut de fonctionnaire (qui fait vivre et en partie se reproduire l’Etat) dans un Etat Capitaliste ? C’est que s’il n’est pas propriétaire de cet Etat, il n’est pas non plus exploité, c’est un bourgeois qui vit via l’impôt de la richesse produite par la société civile, il est un non- capitaliste, mais il transforme l’Etat en capitalisme d’Etat (exploiteur collectif pour pouvoir reproduire son statut).

Quel est le statut d’un fonctionnaire dans un Etat socialiste ?

 

Lui non plus n’est pas propriétaire de cet Etat, lui aussi se reproduit grâce à l’impôt prélevé sur la société, lui aussi transforme le socialisme d’Etat en capitalisme d’Etat.

 

Dire « socialisme » d’Etat c’est dire classes et lutte de classes, et c’est pourquoi le socialisme n’est pas le communisme.

 

Car le communisme est une société sans Etat, une société où c’est l’exploité qui « gère » directement son instance politique et comme on ne peut aboutir par un coup de baguette magique à une telle société, le socialisme et sa forme étatique sont des phases obligées, mais ce n’est pas la fin du combat, la fin du combat de classe, il faut encore une lutte finale pour aboutir au communisme : société sans classes et sans Etat, sans classes parce que sans Etat et sans Etat parce que sans classes. C’est-à-dire sans existence d’un personnel statutairement et professionnellement autonome d’une société civile qui doit être ouvriérisée et prolétarisée.

 

Encore une fois, l’analyse stalinienne essaie de nous persuader que la réalité matérielle du maintien d’un Etat peut-être contre - balancée par l’application d’une ligne idéologique et la dimension redistributive de cette superstructure.

 

Ce que l’on voit c’est qu’on ne peut pas contrebalancer une réalité matérielle, par la seule mise en œuvre d’un environnement culturel. Qu’il y ait un parti communiste au pouvoir, ne change rien, si le fonctionnement de l’Etat n’est pas bouleversé de fond en comble.

 

La disparition de la forme conseilliste des Soviets Russes devenus un parlement de facture classique, même si il a été contrecarré par un recrutement plus démocratique (milieu populaire, femmes, ouvriers, minorités nationales etc.) et le maintien d’un fonctionnariat très semblable à ce qui existait en Occident (petits, moyens et hauts fonctionnaires) ont fait que le capitalisme d’Etat n’a absolument pas été dépassé et que c’est bien cette bourgeoisie d’Etat à laquelle c’est joint celle des entreprises publiques, qui a restauré le capitalisme privé.

 

Reconnaître le caractère « socialiste » d’un Etat, c’est donc en affirmer le caractère contradictoire et instable, c’est donc mettre en avant la nécessité de la poursuite de la lutte des classes pour passer au communisme. Le socialisme contrairement à ce que dit le manuel n’est pas un mode de production, le socialisme c’est une phase de transition entre deux modes de production, Le capitalisme et le communisme.

 

C’est la phase de la dictature du prolétariat, mise en œuvre par un « Etat » de classe qui cherche à transférer à la société civile le pouvoir effectif. Dans le manuel dans un autre chapitre concernant la dictature du prolétariat, ce moment historique est réduit non pas à une phase de longue période, mais à un court moment qui sépare le capitalisme classique du socialisme. Autrement dit dans cette déformation du marxisme, le socialisme devient le stade ultime de développement économique qu’il convient d’atteindre. Mais cette déformation a un but, il s’agit de nier l’obligation de faire disparaître l’Etat. )

 

 

La propriété d’État est la forme de propriété dominante dans la société socialiste : elle embrasse en U.R.S.S. environ 91 % des fonds de production. La plupart des richesses du pays des Soviets, les sources essentielles du bien-être matériel et de la culture des travailleurs sont ainsi le patrimoine du peuple tout entier.

En Union soviétique, les entreprises collectivisées des kolkhoz et des organisations coopératives, leur cheptel vif et mort, leur production et leurs locaux sont propriété coopérative-kolkhozienne. Les kolkhoz et les autres entreprises coopératives exercent leur activité sur un sol qui est le patrimoine du peuple tout entier. L’outillage moderne, concentré en abondance dans les stations de machines et de tracteurs et qui exécute les principaux travaux dans les kolkhoz, est lui aussi le patrimoine du peuple entier.

La propriété coopérative-kolkhozienne comprend avant tout l’avoir des 89 000 kolkhoz : bâtiments, centaines de milliers de fermes d’élevage, bétail de trait collectif, matériel agricole, un vaste réseau de services sociaux et culturels (clubs, salles de lecture, crèches, laboratoires ruraux, etc.) La propriété sociale kolkhozienne s’est accrue dans des proportions considérables au cours de la construction du socialisme. De 1940 à 1954, les fonds indivis des kolkhoz ont augmenté de 180 %.

 

Il existe dans la société socialiste une forme coopérative de production industrielle représentée par les coopératives artisanales. Celles-ci sont surtout appelées à développer la fabrication d’objets de consommation courante en utilisant en premier lieu les ressources locales. Les moyens de production mis en œuvre par les entreprises des coopératives artisanales et leur production sont la propriété de ces dernières. En 1954, on comptait en U.R.S.S. plus de 14 000 coopératives artisanales à production industrielle.

Dans le commerce, les coopératives existent sous la forme de sociétés de consommation groupant surtout les habitants des campagnes. Les 23 000 coopératives de consommation possèdent un important réseau de magasins, de boutiques et d’entrepôts.

L’affermissement et le développement maximums de la propriété d’État d’une part, de la propriété coopérative-kolkhozienne d’autre part, sont une condition essentielle du progrès continu de l’économie nationale et du passage graduel de la société soviétique du socialisme au communisme.

La propriété d’État et la propriété coopérative-kolkhozienne, les entreprises d’État et les exploitations collectives, sont de même type quant à leur nature sociale. Les entreprises d’État et les exploitations collectives ont ceci de commun que les unes et les autres : 1o sont fondées sur des moyens de production socialisés, socialistes, et sur le travail collectif ; 2o excluent la possibilité d’une exploitation de l’homme par l’homme ; 3o fonctionnent suivant un plan en vue de satisfaire les besoins croissants des travailleurs ; 4o appliquent le principe socialiste de la répartition selon le travail.

Mais, par ailleurs, entre la propriété d’État et la propriété coopérative-kolkhozienne, de même qu’entre les entreprises d’État et les exploitations coopératives (collectives), il existe certaines différences.

 

1o Dans les entreprises d’État règnent les rapports de production socialistes sous leur forme la plus évoluée et la plus conséquente. La propriété d’État est le bien du peuple entier ; dans les entreprises d’État, tous les moyens de production sans exception sont socialisés. La propriété coopérative-kolkhozienne est la propriété de groupes, de collectivités ou d’associations de travailleurs (artel agricole, société de consommation, coopérative artisanale) ; dans les kolkhoz (lorsqu’ils ont la forme d’artels) lesprincipaux moyens de production des paysans membres des coopératives sont collectivisés sur la base du libre consentement ; en vertu des Statuts de l’artel agricole, une partie des moyens de production n’est pas socialisée et reste la propriété personnelle du foyer kolkhozien (exploitation auxiliaire individuelle du kolkhozien).

 

2o La production des entreprises d’État est la propriété de l’État socialiste et est réalisée selon les modalités et aux prix établis par les organismes d’État. La production du kolkhoz est la propriété de ce dernier. Une partie lui permet de s’acquitter de ses obligations envers l’État au titre du stockage à des prix fermes établis par l’État, et de payer en nature les travaux exécutés au kolkhoz par la station de machines et de tracteurs. Tout le reste est à la disposition de l’artel, sert à constituer les fonds sociaux kolkhoziens statutaires et est réparti entre les membres de l’artel au prorata des journées-travail effectuées. Une partie de la production des kolkhoz est aussi vendue à l’État à des prix supérieurs aux prix de stockage ou sur le marché kolkhozien aux prix de ce dernier.

 

3o Dans les entreprises d’État, qui sont le bien du peuple entier, la part du produit social qui va à la consommation personnelle de l’ouvrier lui est versée sous forme de salaire. L’État établit d’avance le taux de la rémunération du travail par pièce produite ou par unité de temps. Le kolkhozien, membre d’un artel, reçoit la part de revenu à laquelle il a droit d’après le nombre des journées-travail qu’il a accomplies, part qui est prélevée sur les fonds de son kolkhoz. Le montant de cette part du revenu dépend aussi bien du degré de participation du kolkhozien au travail social (nombre des journées-travail effectuées) que de la productivité du travail et du développement de l’économie collective du kolkhoz (montant de la rémunération de chaque journée-travail). Le revenu de chaque kolkhozien varie avec les résultats du travail du kolkhoz dans son ensemble, le rendement des cultures et la productivité de l’élevage. Le salaire est versé à l’ouvrier en espèces. Les revenus de l’artel sont répartis entre les kolkhoziens en espèces et en nature (produits agricoles). Si l’ouvrier tire son revenu uniquement du travail qu’il accomplit dans l’entreprise socialiste, le kolkhozien a pour principale source de revenu son travail dans l’exploitation collective du kolkhoz, et pour source d’appoint celui qu’il effectue dans son exploitation auxiliaire individuelle. Le kolkhozien réalise sur le marché une partie de la production qu’il a reçue au titre des journées-travail et de celle qui provient de son exploitation auxiliaire individuelle.

 

4o L’État socialiste administre lui-même les entreprises qui lui appartiennent par l’intermédiaire de directeurs, ses fondés de pouvoirs que nomment et révoquent ses organismes compétents ( ?). Ce sont des organismes d’État qui planifient toute l’activité de ces entreprises en matière de production et établissent les principales dispositions concernant l’organisation socialiste du travail. Dans les kolkhoz, en raison de leur nature coopérative, toutes les affaires sont gérées par l’organe supérieur de l’artel agricole : l’assemblée générale des kolkhoziens, ainsi que par la direction et le président du kolkhoz qu’elle a élus. Les plans de production et le budget de l’artel, le règlement intérieur, les normes de rendement et leur tarification, les modalités de la répartition des revenus sont fixés par les kolkhoziens eux-mêmes sur la base des Statuts de l’artel agricole, en s’inspirant des lois existantes, des objectifs assignés par le plan et les directives de l’État socialiste.

 

Les différences qui existent entre les entreprises d’État et les exploitations coopératives (collectives) ne sont pas essentielles. Ces différences entre les deux formes d’économie ne sortent cas du cadre des rapports de production socialistes. La propriété d’État est la forme supérieure de la propriété socialiste, de même que la production d’État est la forme supérieure de la production socialiste.

Les entreprises fondées entièrement sur la propriété d’État sont des entreprises de type socialiste conséquent. Ce sont, disait Lénine, des entreprises où

‘les moyens de production appartiennent à l’État ; de même la terre où se trouve l’entreprise et toute l’entreprise dans son ensemble. ’ (V. Lénine, « De la coopération ». Œuvres, t. 33, p. 486.)

 

 

 

 

 

( Note de lecture : 

 

On voit bien dans le chapitre ci-dessus à quel point la confusion existe chez ces auteurs entre étatisation et socialisation. Dès qu’il s’agit d’entrer dans l’analyse concrète de ce qui distingue l’étatisation de la socialisation, le raisonnement devient extrême faible et les choses sont plus affirmées que démontrées. La classe ouvrière « est » au pouvoir, « l’Etat » est « socialiste », Il n’y a plus d’exploitation, mais les salaires et les prix existent. Il y a une distinction entre entreprises d’Etat et entreprises coopératives mais en fait tout cela n’est pas si grave et cela ne joue aucun rôle contradictoire. Etc. etc.

Mais il y a un paragraphe extrêmement intéressant (que nous avons souligné) où les auteurs lâchent le morceau. Quand il s’agit de dire qui dirige vraiment les entreprises en URSS. Les auteurs n’hésitent pas à dire que ce sont les dirigeants d’entreprises en lien avec les autorités de l’Etat qui planifient tout cela. Autrement dit en lisant cette littérature stalinienne on peut clairement découvrir qu’il y a une classe dirigeante en URSS, que celle-ci,n’est pas la classe ouvrière, mais bien le groupe formé des cadres dirigeants d’entreprises et des fonctionnaires de l’Etat.

 

Cette bourgeoisie, n’est pas personnellement propriétaire du capital, mais elle se sert de la socialisation de sa forme « l’économie publique » pour se reproduire. L’économie publique, n’est pas l’économie commune, elle n’est qu’un premier stade du collectivisme, qui détruit la propriété privée, mais ne donne pas le pouvoir réelle à la classe ouvrière. Il faut donc une révolution dans la révolution pour faire disparaître cette nouvelle bourgeoisie en faisant disparaître l’Etat et l’économie publique.)

 

 

Dans les entreprises d’État, les moyens de production, le travail des ouvriers et des employés et ce qu’ils produisent sont socialisés à l’échelle de toute la société. La production d’État règne sur toute l’industrie socialiste, branche maîtresse de l’économie nationale. Les grandes fabriques de denrées agricoles que constituent les sovkhoz sont le bien du peuple entier. La terre et les principaux moyens de production : tracteurs, moissonneuses-batteuses et autres machines agricoles, concentrées dans les stations de machines et de tracteurs et les sovkhoz, sont la propriété de l’État. La propriété d’État, forme supérieure de la propriété socialiste, joue un rôle capital, déterminant, dans l’économie nationale.

 

Lire Staline aujourd'hui partie 3

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