top of page
imagesCAKKAIG8.jpg
kollontai5.jpg

Crise de l'Instruction Publique ou crise de l'Education Populaire Révolutionnaire

Notre analyse :

Les Gauches dont parle A.L, demandent que l'école soit professionnelle dès le début parce qu'elles craignent que le manque d'entrainement à créer des techniques et des technologies nouvelles imprime dès l'apprentissage, la question de la division du travail et de la désappropriation du travailleur manuel d'avec ses outils et ses objets de travail, et n'aboutisse à créer une classe ouvrière qui continue de se soumettre à un procès de travail et de production, englués dans une conception passée.

A.L n'ignore pas le problème, mais il dévie la réflexion en affirmant que la classe ouvrière aime apprendre quand on lui propose  " la porté pratique d'un travail scientifiquement organisé ". Autrement dit, quand on lui propose de réfléchir, de découvrir, dans le cadre d'une division scientifique (la fameuse division scientifique du travail) déjà existante. On sent là tout le poids du taylorisme, qui encourage à la recherche de productivité, mais pas à la remise en cause des techniques par lesquelles elle est engendrée. Idée accentuée par son redoublement assertif " fondée sur la science appliquée et par son intermédiaire sur la science fondamentale ". S'il faut passer par la science appliquée pour accéder à la science fondamentale, celui qui s'interroge sur des assertions de la science fondamentale ou souhaite tout simplement la développer, ne peut conduire sa réflexion sans mettre en œuvre une épistémologie de la science appliquée, et donc procéder à sa remise en cause partielle ou totale. Comment y parvenir, s'il n'y a qu'une seule " bonne "voie qui soit proposée, s'il ne dispose pas d'outils " propres ", et s'il ne sait pas préalablement entraîné à la questionner voir à la remettre en cause. Les mêmes causes engendrant les mêmes effets, quand A.L développe sa vision de l'Ecole du travail, il s'attaque à l'exercice pour l'exercice et notamment, l'exercice qui détourne de la question réelle. Par exemple une mauvaise utilisation du travail ménager comme forme d'entrainement pour le travail industriel, quand le travail ménagé est utilisé pour lui-même et non comme méthode d'acquisition de connaissances scientifiques par une recherche abstractive. Il partage là, fort justement, des préoccupations communes avec A. Kollontaï (dont nous reproduisons des extraits de la brochure) ainsi qu'au GFEN. Mais la solution qu'il propose pour le travail ménager dans sa dimension de science fondamentale consiste pour résoudre la question de sa production, et donc dans sa dimension de science appliquée à en externaliser la fabrication et /ou à la mécaniser.

Nous nous trouvons ici dans un exemple particulièrement intéressant, puisqu'il développe la même déviation que pour le travail industriel. Or nous bénéficions aujourd'hui d'études extrêmement complètes sur l'évolution du travail domestique dans les sociétés développées. La libération des femmes par l'externalisation et la mécanisation des tâches domestiques, n'a pas eu lieu. Certes ces tâches ont diminué en pénibilité physique, mais le temps que les femmes y consacrent n'a pas diminué et surtout la part occupée par chacun des sexes dans ses travaux forme particulière de division du travail basée sur la division des sexes, est restée la même. En gros un rapport du temps de travail de 80/20 au détriment des femmes. Le travail domestique est donc encore un travail " sous qualifié " occupé par des femmes, malgré tout le bouleversement technologique et scientifique qu'on lui a apporté pour l'effectuer.

Ce qui illustre très clairement la thèse que le bouleversement des forces productives est très loin d'entrainer mécaniquement le bouleversement des rapports de production. Contrairement à ce qu'affirme la doxa stalinienne et à ce que continue d'affirmer la direction actuelle du P.C.F

Place maintenant à Alexandra Kollontaï dont on voudra bien se souvenir qu'elle ne fût pas seulement la défenseuse intransigeante du Pouvoir Ouvrier, elle fût aussi une féministe avertie.
__________________________________________________________________________________________________________
Alexandra Kollontaï extraits de sa brochure " l'Opposition Ouvrière ".

La situation Russe :

" La première, principale et fondamentale, c'est l'environnement dévasté dans lequel notre Parti doit travailler et agir. Le Parti communiste russe doit construire le Communisme et faire passer son programme dans les faits :

Dans les conditions d'une destruction complète et d'un effondrement de la structure de l'économie.

1.     Face à la pression brutale et incessante des États impérialistes et des Gardes blancs.
2.      A la classe ouvrière russe a été imparti de construire le communisme, créer de nouvelles formes communistes d'économie dans un pays économiquement arriéré avec une population en majorité paysanne, où les conditions économiques nécessaires à la socialisation de la production et de la distribution manquent, et où le capitalisme n'a pas encore été capable d'achever le cycle de son développement (du premier stade de lutte concurrentielle illimitée à sa forme la plus avancée - la régulation de la production par des syndicats capitalistes, les trusts). "

Les effets de la N.E.P :

" En plus des petits propriétaires villageois et des éléments bourgeois des villes, la politique de notre Parti doit compter avec l'influence exercée par les représentants de la bourgeoisie riche qui font leur apparition maintenant en la personne de spécialistes, de techniciens, d'ingénieurs et d'anciens directeurs d'entreprises industrielles et financières qui, par leur expérience passée sont liés au système capitaliste de la production. Ils ne peuvent même pas imaginer un autre système de production en dehors de celui qui se situe dans les limites traditionnelles de l'économie capitaliste.

Plus la Russie soviétique éprouve le besoin de spécialistes dans le domaine de la technique et de la direction de la production, plus forte devient l'influence de ces éléments étrangers à notre classe ouvrière, sur le développement de notre économie. Ayant été rejetés pendant la première période la révolution, et étant obligés de prendre une attitude d'attentisme prudent et parfois même ouvertement hostile envers les autorités soviétiques en particulier pendant les mois les plus difficiles de sabotage historique par les intellectuels, ce groupe social de cerveaux utilisés par la production capitaliste, serviteurs obéissants, achetés, grassement payés du capital, acquièrent une influence et une importance politique chaque jour plus grandes. "

Etat Prolétarien ou Etat du prolétariat :

" Le prolétariat ne mettait pas en question leur capacité supérieure dans les affaires militaires, comprenant pleinement par un sain instinct de classe que dans le domaine militaire la classe ouvrière en tant que classe ne peut pas formuler des idées nouvelles et est incapable d'introduire des changements substantiels dans le système militaire - de le reconstruire sur une base de classe. Le militarisme professionnel - héritage des siècles passés - le militarisme, les guerres, ne trouveront pas de place dans la société communiste. La lutte suivra d'autres voies, prendra les formes nettement différentes, inconcevables pour notre imagination. L'esprit militaire vit ses derniers jours pendant la phase transitoire de dictature du prolétariat; il n'est donc pas étonnant que les ouvriers, en tant que classe, ne purent y introduire rien de nouveau et d'important pour le développement futur de la société. Pourtant, même dans l'Armée Rouge la classe ouvrière apporta des changements; mais la nature du militarisme resta la même et la direction des affaires militaires par les anciens officiers et généraux de la vieille armée n'a pas fait dévier la politique soviétique dans le domaine militaire au point où les travailleurs pourraient éprouver des préjudices, eux-mêmes ou leurs intérêts de classe.

Mais dans le domaine économique les choses sont tout à fait différentes. La production, son organisation constituent l'essentiel du communisme. Exclure les travailleurs de l'organisation de la production, les priver (eux ou leurs organisations propres) de la possibilité de créer de nouvelles formes de production dans l'industrie par le moyen de leurs syndicats, refuser ces expressions de l'organisation de classe du prolétariat pour se fier entièrement à l'habileté de spécialistes habitués et entraînés à opérer la production sous un système tout à fait différent, c'est quitter les rails de la pensée marxiste scientifique. C'est pourtant ce que sont précisément en train de faire les dirigeants de notre Parti. "

" Plus le Parti attire les meilleurs éléments de nos syndicats et de nos usines en les envoyant au front ou dans les institutions soviétiques, plus devient faible la liaison entre les ouvriers de la base et les centres directeurs du Parti. Le hiatus s'approfondit, et c'est pourquoi maintenant cette division apparaît dans les rangs du Parti lui-même. Les ouvriers, par l'intermédiaire de leur Opposition ouvrière, demandent : " Que sommes-nous ? Sommes-nous vraiment le fer de lance de la dictature de classe, ou bien simplement un troupeau obéissant qui sert de soutien, à ceux qui, ayant coupé tous les liens avec les masses, mènent leur propre politique et construisent l'industrie sans se soucier de nos opinions et de nos capacités créatrices, sous le couvert du nom du Parti ? "

La pédagogie de la découverte y compris pour les entreprises :

" La solution du problème que proposent les syndicats industriels consiste à donner aux ouvriers liberté complète d'expérimenter, d'adapter et de découvrir les nouvelles formes de production, d'organiser la formation professionnelle sur des bases de classe, d'exprimer et de développer leurs capacités créatrices. C'est la façon dont l'Opposition ouvrière conçoit la solution de ce problème difficile, d'où le point essentiel de ces thèses : " L'organisation du contrôle de l'économie sociale est la prérogative du Congrès panrusse des producteurs, unis dans leurs syndicats et élisant le corps central dirigeant toute la vie économique de la République ". Ce point assure la liberté d'exprimer les capacités créatrices de la classe ouvrière sans qu'elles soient restreintes et mutilées par la machine bureaucratique saturée de l'esprit de routine du système bourgeois capitaliste de production et de contrôle. L'Opposition ouvrière a confiance dans le pouvoir créateur de sa propre classe : la classe ouvrière. De cette prémisse, découle le reste de son programme. "

Les principes éducatifs en débats :

" Selon l'opinion de Lénine, les syndicats - c'est-à-dire les organisations de la classe ouvrière - ne sont pas les créateurs des formes communistes de l'économie du peuple, ils servent seulement de courroie de transmission entre l'avant-garde et les masses : " les syndicats dans leur travail quotidien doivent persuader les masses, les masses de cette classe qui... etc. "

Ce n'est pas le système de Trotsky, un système médiéval d'éducation. C'est le système allemand de Froebel et Pestalozzi, qui fonde l'éducation sur l'étude d'exemples. Les syndicats ne doivent rien faire de vital dans l'industrie, mais persuader les masses, les maintenir en contact avec l'avant-garde, avec le Parti, qui (retenez bien cela) n'organise pas la production comme une collectivité, mais crée seulement les institutions soviétiques économiques de composition hétérogène, dans lesquelles il nomme des communistes. "

" De l'éducation, encore de l'éducation, plus d'éducation " : voilà le mot d'ordre de Lénine - Zinoviev. Boukharine, lui, veut cependant tabler sur le radicalisme concernant le système d'éducation syndicale et évidemment, a bien mérité les remontrances de Lénine et le surnom de " Simidicomiste " Boukharine et son groupe, tout en mettant l'accent sur le rôle éducatif du syndicat dans la situation politique présente, est partisan d'une démocratie prolétarienne complète à l'intérieur des syndicats -- de l'octroi aux syndicats de larges pouvoirs électoraux, non seulement des principes d'élection généralement appliqués, mais pour une élection inconditionnelle de délégués nommés par le syndicat. Eh bien ! quelle démocratie ! Ceci sent son Opposition, à une différence près. L'Opposition ouvrière voit dans les syndicats les organisateurs et les créateurs de l'économie communiste, tandis que Boukharine, comme Lénine et Trotsky leur laisse seulement le rôle " d'école de communisme ", rien de plus. Pourquoi Boukharine ne jouerait-il pas avec le principe de l'élection, quand on sait bien que cela n'affectera en rien, ni en bien ni en mal, le système de gestion industrielle ? Car en fait, le contrôle de l'industrie restera toujours en dehors des syndicats, au-delà de leur prise -- dans les mains des institutions soviétiques. Boukharine nous fait penser à ces professeurs qui éduquent, selon le vieux système, au moyen de " livres " : " Vous devez apprendre jusque là, et pas plus loin ", tandis que par ailleurs ils encouragent " l'activité autonome " des élèves s'il s'agit d'organiser des bals, des distractions, etc.

De cette façon, les deux systèmes peuvent très bien s'accorder et cohabiter. Mais quelle sera l'issue de cela ? Et quelles tâches les élèves de ces professeurs d'éclectismes pourront-ils accomplir ? Ça, c'est une autre question. Si le camarade Lounatcharski devait désapprouver les " hérésies éclectiques " de réunions d'éducateurs comme celle-ci, la position du Commissariat du Peuple à l'Éducation deviendrait bien précaire. "
__________________________________________________________________________________________________________

 

Notre analyse :

Dans son article Alexandra pose très clairement les jalons de la juste résolution des contradictions. Premier moment : l'analyse mondiale : Nous en sommes bien au stade de l'impérialisme et des trusts, Alexandra Kollontaï est complètement léniniste. Second moment : l'analyse de la N.E.P : cet Etat, l'Etat Prolétarien, est mixte, et contradictoire, y domine encore une fraction non négligeable de l'ancienne bourgeoise. Le besoin de cadres qualifiés dans les ministères et les entreprises fait que c'est dans ses rangs qu'on puise pour fournir la matière première. Leur présence et leur ancien " style " nourrissent le renouvellement des anciennes méthodes et des anciens rapports et empêchent l'émergence d'une révolution culturelle favorable à la classe ouvrière. La NEP restaure le marché, et le capitalisme d'Etat réintroduit par Lénine dans la gestion des entreprises se révèle fatidique à l'émergence des valeurs de la classe ouvrière, il l'empêche de s'imposer comme classe dominante, puisqu'aucun modèle productif ou éducatif ne permettent de faire émerger les valeurs qui lui sont propres et donc favorise son émergence comme classe dominante. Staline " résoudra " cette contradiction en la portant à un niveau " explosif ". C'est l'imposition du capitalisme d'Etat à tous les étages, y compris sur le marché. Il nationalise, fait monter les cadres " ouvriers " par la méritocratie dans l'appareil d'Etat, et comme il étatise toutes les fonctions sociales, il rend l'Etat impérissable. La route du communisme devient dès lors impossible. Est-ce ce à quoi il voulait aboutir ? Nul ne peut aujourd'hui éluder la question.

Collectif et Collectivisme :


Il faut mettre en commun les capacités du genre humain pour un projet, un but, un objectif qui dépasse la somme des capacités et des intérêts individuels.
La Science, les moyens de production sont des objets universels ou universalisables, que tout être humain est susceptible de saisir, par le fait même d'exister hors de la conscience qui les perçoit comme phénomène sensible, mais à travers des supports qui pour leur immense majorité sont communs : les sens, la connaissance, la reproduction. Intégrés subjectivement au sein de la force de travail ces instruments peuvent-ils retrouver une universalité, se penser eux-mêmes force collective objective alors que la spécificité humaine est de n'éprouver physiquement leur universalité qu'à travers l'expression d'une subjectivité particulière. C'est tout l'enjeu de la construction du travailleur moderne, le " Travailleur collectif ", faire venir à la conscience de façon objective (et non subjectivent le marxisme n'est pas un psychologisme) ce qu'objectivement le capital a déjà produit. C'est la route qui mène de l'Etat Prolétarien à la société ouvrière ou société sans classes et sans Etat.

La méthodologie, la technique mise en œuvre, est donc essentielle. Les communistes doivent en importer l'esprit à l'entreprise de façon à favoriser " la libération " de la classe ouvrière. Se contenter de reconnaître que la majorité des échelons hiérarchiques de production et de direction sont aujourd'hui en crise, ce n'est pas apporter une solution à cette crise. C'est surfer sur la vague de mécontentement en en restant à un esprit social-démocrate du " tous victimes ", et appeler à un tous ensembles " bénéficiaires " d'une politique " sociale " qui assurera pour eux, la bonne direction, mais en ne remettant rien de fondamentale en cause. C'est la stratégie de la " gauche ".Gérons ! Gérons le social ! qui est en crise, mais surtout évitons d'aborder les sujets qui fâchent. Car tout ce beau monde n'existe que par la délégation de pouvoir. Ils n'ont aucun intérêt à en contester les mécanismes.

La Révolution Culturelle Ouvrière (et non pas prolétarienne) ne peut avoir lieu que si elle s'attaque frontalement à la division du travail. Y compris quand celle-ci se perpétue au travers de l'Etat Prolétarien. Elle doit le faire sans excès et sans déviation de type gauchiste, mais elle doit le faire clairement, fermement, frontalement. Une telle exigence ne part pas de rien, nous ne sommes pas sans bagages, si dans le domaine des actifs adultes beaucoup de choses ont été abandonnés depuis " l'oublie " du concept d'Autogestion sous domination conceptuelle communiste. Cette interrogation est reprise par exemple dans le courant moderne de l'auto-socio-construction de nos amis du GFEN, qui travaille en direction de la jeune génération. Définir préalablement des outils de travail pour entrer dans une matière (l'objet de travail), c'est fixer le procès de travail scolaire sous le modèle de la reproduction en l'éternisant. Alors qu'il s'agit, non pas d'encadrer la jeune pensée enfantine en l'habituant à la soumission, mais au contraire de lui donner l'habitude de s'entrainer à la création. Comme les pédagogues Institutionnels, ils sont donc conduits à interroger le mode d'organisation et de division du travail qui règne dans l'institution..Les communistes doivent retrouver l'engagement à l'entreprise, ils doivent aussi redresser la C.G.T pour ouvrir le chemin du communisme, le chemin du collectivisme. Ils doivent interroger et remettre en cause si nécessaire, les modèles de production, les modes de délégation. Pour cela ils ont besoin que ceux qui seront chargés d'ouvrir cette période y soit préparés, notamment les organisations de jeunesse.

 

Dans ce domaine un profond recule a été enregistré. Aucune éducation communiste, politique, idéologique n'y est plus dispensée. C'est la domination absolue de l'humanisme mou, a-principiel, le " jeunisme " en " général ", où le jeune travailleur, le jeune paysan n'ont leur mot à dire que parce qu'ils sont jeunes, mais pas parce qu'ils sont salariés ou paysans. Aucun contenu critique vis-à-vis du travail ne leurs est fourni, favorisant chez eux le désir d'un rapport " autre " à celui-ci. Quand aux jeunes étudiants communistes, on leur a supprimé " Clarté " leur organe de presse, alors le rapport épistémologique aux matières qu'on leurs enseigne, pensez-donc ! Mieux vaut pour la direction s'accrocher aux rapports bien plus profitables des " combinaisons " électorales d'un syndicalisme étudiant, moribond, offert sur un plateau aux socialistes !

   

P M


(1) Crise de l'Education  Nationale ou crise de l'Education Populaire Révolutionnaire (sur ce site).
bottom of page