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(D.C.O)

partie 1

Le Trotskisme est un social - démocratisme "révolutionnaire". L'homme au dessus des "fractions" ne résout pas mieux que Staline la question du passage au communisme, car comme lui, il construit la résolution des contradictions sur la toute puissance des forces productives.

Nous avons traité dans un précédent article, du rapport de Lénine au capitalisme d'Etat, nous avons vu que dans une de ses œuvres majeures " Sur l'Infantilisme de Gauche ", il affirme tous les effets bénéfiques qu'il attend de ce stade de développement, pour contrebalancer le capitalisme privé et renforcer le poids du socialisme.
Nous allons maintenant nous intéresser au point de vue de Trotski. Celui-ci dans un article célèbre s'en prend aux différents groupes constituant la Gauche Communiste historique et à ce qu'il présente comme l'inconséquence conceptuelle de ceux -ci. Cette gauche serait incapable de définir ce qu'est précisément la nature " nouvelle " du Capitalisme d'Etat en construction dans la formation sociale soviétique, en quoi ce dernier s'identifie ou au contraire se différencie de sa forme traditionnelle dominante, dans les Etats capitalistes.
Nous chercherons à montrer, que si la Gauche Communiste Historique peine à définir conceptuellement une telle approche (voir notre article : La Gauche Communiste historique et le Capitalisme d'Etat) la théorie substitutive que tente d'élaborer Trotski, celle de "l'Etat-Ouvrier bureaucratiquement dégénéré", ainsi que les explications qu'il y adjoint instaure un confusionnisme encore plus grand.
La théorie économique de Trotski apparaît comme un ensemble plus influencé par David Ricardo que par Marx ou Lénine, formée de concepts peu et mal cernés, allant jusqu'à rendre parfois l'ensemble incompréhensible. Nous avons pourvu d'un point d'interrogation les parties qui nous paraissent constituer un ensemble incohérent, voire un ensemble qui contredit littéralement la théorie léniniste.

 

Urbahns et le Léninbund contre qui Trotski polémique sont des exceptions de la Gauche Communiste (Historique), puisque à l’opposé de celle-ci Urbahns considère que le stade du capitalisme d’Etat est un stade progressiste. Il contient un caractère de socialisation objective qui s’exprime à travers la forme juridique de la nationalisation. Pour la Gauche Communiste (Historique), la nationalisation, en ce qu’elle est un capitalisme d’Etat est le mal absolu (fascisme rouge). Dans ce texte, Trotski accepte sa réalité comme expression d’une phase d’économie mixte, mis en place pour suppléer provisoirement à la crise de l’approvisionnement et à la reconstruction (N.E.P) dans l'U.R.S.S des années 20, mais il nie son caractère progressiste dans l’évolution de la société, de ce point de vue il penche du côté de la tendance majoritaire de la Gauche Communiste (Historique), Urbahns, lui ,en se référant à Lénine ne se trompe pas :« Leninbund », mais il ne produit pas de critique des procès de production et de travail, contre quoi la Gauche Communiste Russe est en combat avec Lénine. Il considère l’URSS comme un capitalisme d’Etat, ce que Trotski lui reproche , qui parle lui d’un Etat ouvrier dégénéré.

 

 

 

Extrait issu de : " La 4ième Internationale et l'U.R.S.S " Constantinople 1929, in " La nature de L'U.R.S.S " textes rassemblés et présentés par J.L Dallemagne. - C.E.P 1974

 

Capitalisme d’Etat

 

" …Le Capitalisme d'Etat est selon Urbahns, la dernière forme d'autodéfense du régime bourgeois : il suffit de regarder l'Etat corporatif " planifié " en Italie, en Allemagne et aux Etats-Unis. Habitué aux gestes larges, Urbahns ajoute aussi ici l'U.R.S.S. De cela, nous en parlerons plus bas. En ce qui concerne les Etats impérialistes, Urbahns touche un phénomène extrêmement important de notre époque. Le capitalisme monopolisateur a dépassé depuis longtemps les cadres même de la propriété privée des moyens de production (?) et les limites de l'Etat national (?). Cependant la classe ouvrière, paralysée par ses propres organisations, n'a pas pu se libérer à temps des chaînes capitalistes des forces productives( ?) de la société, de là une époque qui traîne en longueur, de convulsions économiques et politiques. Les forces productives se heurtent aux cloisons de la propriété privée et des frontières nationales( ?).
Les Etats bourgeois sont contraints de réprimer ( ?) la révolte (?) des forces productives à l'aide du poing policier. C'est cela la prétendue " économie planifiée ". On peut conventionnellement la nommer capitalisme d'Etat, dans la mesure où l'Etat tente de dompter et de discipliner l'anarchie capitaliste.
Rappelons cependant que primitivement les marxistes, sous le mot capitalisme d'Etat, comprenaient uniquement les entreprises économiques appartenant à l'Etat. Quand les réformistes révèrent de vaincre le capitalisme à l'aide de la municipalisation et de l'Etatisation d'un nombre toujours plus grand d'entreprises des transports et de l'industrie, les marxistes répliquèrent : ce n'est pas le socialisme, mais du capitalisme d'Etat. Cependant par la suite, cette mention reçut un sens élargi et vint s'appliquer à toutes les formes d'immixtion de l'Etat dans l'économie : les français emploient dans ce sens le mot " étatisme ".

Urbahns, cependant, ne constate pas seulement les tentatives du " capitalisme d'Etat "- Il les apprécie à sa manière. Autant qu'on peut comprendre quelque chose chez lui, il déclare que le régime du " capitalisme d'Etat " est un stade indispensable, et en outre progressif, dans le développement de la société, dans le même sens que le trust est un progrès en comparaison avec les entreprises dispersées. Cette seule erreur fondamentale dans l'appréciation de la planification capitaliste suffit à enterrer n'importe quelle tendance.

Si  à l'époque de l'ascension du capitaliste, à laquelle la guerre mit fin (?), on pouvait considérer les différentes formes d'étatisation - avec certaines prémices politiques- comme un phénomène progressif, c'est à dire penser que le capitalisme d'Etat menait la société en avant, en facilitant le futur travail économique de la dictature prolétarienne, il faut considérer " l'économie planifiée " actuelle comme un stade absolument réactionnaire( ?)
Le Capitalisme d'Etat aspire à arracher l'économie à la division internationale du travail ( ?), à adapter les forces productives au lit de Procus de l'Etat national (?), à réduire artificiellement (?) l'économie dans certaines branches et à créer artificiellement d'autres branches à l'aide d'immenses faux frais ( ?) La politique économique de l'Etat actuel, en commençant par des douanes du type de celles de l'ancienne chine et finissant aux épisodes d'interdiction de machines dans " l'économie planifiée " de Hitler, parvient à une régulation instable aux prix de l'abaissement de l'économie nationale( ?), de l'introduction du chaos dans les relations mondiales (?) et d'un désarroi complet du système monétaire ( ?), dont on aura bien besoin pour la planification socialiste (?) ( ?).
Le Capitalisme d'Etat actuel ne prépare pas et ne facilite pas le futur travail de l'Etat ( ?) socialiste : au contraire, il crée pour ce travail de colossales difficultés supplémentaires( ?). Le prolétariat à laissé échapper un certain nombre de moments pour prendre le pouvoir. Ainsi, il créé les conditions : dans la politique- pour la barbarie fasciste, dans l'économie- pour le travail destructeurs du " capitalisme d'Etat ". Après la conquête du pouvoir, le prolétariat aura à s'acquitter économiquement de ses manquements politiques. "

" Cependant, dans les cadres du présent travail, ce qui nous intéresse avant, tout, c'est le fait qu’Urbahns tente de présenter aussi l'économie soviétique sous la notion de " Capitalisme d'Etat ". Pour cela c'est difficile à croire, il se réfère à Lénine. Une seule manière d'expliquer cette référence : éternel inventeur, qui crée chaque mois une théorie nouvelle, Urbahns n'a pas le temps de lire les livres auxquels il se réfère. Le terme de " Capitalisme d'Etat ", Lénine l'applique réellement, mais pas à l'économie soviétique dans son ensemble, seulement à une partie déterminée de celle-ci : aux concessions étrangères, aux sociétés mixtes industrielles et commerciales et en partie, à la coopération paysanne, dans une grande mesure " koulak ", contrôlés par l'Etat. Tout cela, ce sont des éléments indiscutables de capitalisme ; mais, puisqu'ils sont contrôlés par l'Etat et même fonctionnent avec sa participation directe, comme les sociétés mixtes, Lénine conventionnellement "entre guillemets ", selon sa propre expression, nommait ces formes économiques " Capitalisme d'Etat ", ce qui faisait que le terme était conventionnel, c'était qu'il s'agissait non pas d'un Etat bourgeois ( ?) Mais d'un Etat prolétarien( ?) : les guillemets devaient précisément souligner cette différence qui n'est pas de peu d'importance. Cependant, dans la mesure où l'Etat prolétarien tolérait le capital privé et lui permettait, dans certaines limites, d'exploiter les ouvriers, il couvrait d'une de ses ailes des rapports bourgeois. C'est dans se sens, strictement restreint, qu'on pouvait parler de " Capitalisme d'Etat ".

Lénine lança le terme même au moment du passage à la N.E.P ; Quand il supposait que les concessions et les " sociétés mixtes ", c'est à dire les entreprises basées sur l'union du capital étatique et privé( ?), prendrait une place très grande dans l'économie soviétique, à côté des trusts et des syndicats purement étatiques ( ?). En opposition avec les entreprises étatiques, c'est à dire les concessions, etc.…, Lénine définissait les trusts et syndicats soviétiques comme des " entreprises du type socialiste conséquent " Le développement ultérieur de l'économie soviétique, particulièrement l'industrie Lénine se le représentait sous la forme d'une concurrence des entreprises étatiques-capitalistes et celles purement étatiques ( ?)     

Maintenant, espérons- nous, on voit clairement dans quelles limites Lénine employait le terme, qui a séduit Urbahns. Pour achever la catastrophe théorique du chef du " Lénin { !} Bund ", il faut encore rappeler que les concessions et les sociétés mixtes, contrairement aux premières attentes de Lénine, n'ont joué dans l'économie soviétique presque aucun rôle. Il ne reste maintenant absolument rien de ces entreprises étatiques-capitalistes. Au contraire, les trusts soviétiques, dont le sort se montrait encore très précaire à l'aube de la N.E.P ; ont reçu dans les années qui suivirent la mort de Lénine un développement gigantesque. Ainsi, si on utilise la terminologie de Lénine consciencieusement et en comprenant la chose, il revient à dire que le développement économique des soviets à complètement passé à côté du stade du " capitalisme d'Etat " et s'est développé par le canal des entreprises du " type socialiste conséquent "( ?).
Cependant, ici aussi, il faut écarter des malentendus possibles, cette fois-ci d'un genre tout à fait contraire. Lénine choisissait ses termes exactement. Il appelait les trusts non pas les entreprises socialistes, comme les nomment maintenant les stalinistes, mais des entreprises du " type socialiste " ( ?),
Cette distinction précise dans la terminologie signifiait, sous la plume de Lénine, que les trusts recevront le droit de se qualifier de socialistes, non pas pour le type ( ?), c'est à dire pour les tendances, mais pour leur contenu ( ?), quand ils auront révolutionné ( ?) L’économie agraire, quand ils auront anéanti la contradiction entre la ville et le village, autrement dit seulement quand, sur la base de l'industrie nationalisée ( ?) et de l'agriculture collectivisée ( ?) ils formeront une véritable société socialiste. L'accomplissement de ce but, Lénine l'envisageait comme le travail successif de deux ou trois générations, d'ailleurs en liaison indissoluble avec le développement de la révolution internationale.
Résumons-nous. Par capitalisme d'Etat, dans le sens strict du mot, il faut comprendre la direction par l’Etat bourgeois d'entreprises industrielles et autres pour son propre compte ou l'immixtion " régularisante " de l'Etat bourgeois dans le travail des entreprises capitalistes privées. Par capitalisme d'Etat, entre guillemets, Lénine comprenait le contrôle de l'état prolétarien sur les entreprises et les rapports capitalistes privés. Pas une seule de ces définitions ne peut s'appliquer à l'état soviétique actuel. Quel contenu économique concret Urbahns donne t’il précisément à la notion de " Capitalisme d’Etat " soviétique, ça reste absolument secret. Autant dire que toute sa théorie nouvelle est construite sur une citation mal lue. "

 

 

 Reprenons quelques affirmations de l'analyse de Trotski.

L’affirmation selon laquelle Urbahns ne comprend rien à rien, mélange tout, et donne un caractère progressiste au capitalisme d’Etat alors que Lénine lui le subirait et ne lui reconnaîtrait nullement un tel caractère, est un mensonge (une omission ?, une méconnaissance ?) que l’analyse même des textes de Lénine vient contrecarrer. Lénine ne cesse de répéter que le capitalisme d’Etat constitue un progrès et que la situation de crise nécessite sa réimplantation et son extension dans la formation sociale russe ( nous analysons un seul de ses textes sur notre site « Sur l’Infantilisme de gauche » qui rétablit cette vérité comme élémentaire, mais dans ce texte, Lénine renvoie à d’autres œuvres où il dit la même chose, il utilise même le rappel à ses œuvres pour marteler son idée (Dans son ouvrage "Lénine, les paysans, Taylor" l'historien (sociologue) engagé Robert Linhart avance d'autres textes de Lénine qui défendent cette idée), mais surtout Trotski en réduisant la question du capitalisme d’Etat aux formes de propriétés escamote la question du droit socialiste (nationalisation puis collectivisation).

Qu’est-ce que la nationalisation dans une société capitaliste, c’est le fait que l’Etat soit propriétaire des moyens de production. Qu’est-ce que l’Etat pour la définition bourgeoise de l'Etat-Nation, c’est l’expression du pouvoir politique du peuple. L’Etatisation s’exprime sous la forme juridique d’une nationalisation. Qu’est-ce qu’une entreprise socialiste qui n’est pas une coopérative dans un régime socialiste ? C’est une entreprise dont l’Etat est propriétaire, et l’Etat c’est le peuple. L’Etatisation s’exprime sous la forme de nationalisation. Où est la différence ?  Il n'y en a pas !

 

La seule, dans cette vision des choses, c’est le caractère plus ou moins social de cette nationalisation, poids des syndicats, dimension sociale et redistributive de cette entreprise, lois du marché et loi de la valeur, c’est à quoi se réduit la notion de nationalisation socialiste. Ce en quoi Urbahns ne se trompe absolument pas en définissant la nationalisation socialiste comme un capitalisme d’Etat à caractère progressiste. Si on veut poser la question du caractère socialiste d’une entreprise on ne peut  donc s’en tenir à la propriété, il faut aussi regarder la nature de l’organisation du travail, la ligne hiérarchique, la ligne de production. Sujet que Trotski ignore complètement, et auquel l’essentiel du livre de Lénine est consacré, où il dit répondre à la critique de la Gauche Communiste et où de fait il ne répond pas (voir notre critique « Lénine et le Capitalisme d’Etat »).

 

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 " Le capitalisme 'monopolisateur' a dépassé depuis longtemps les cadres même de la propriété privée des moyens de production et les limites de l'Etat national " Trotski



Si on s'en tient au sens premier de cette phrase, littéralement parlant, nous devrions être dans un système autre que le capitalisme, les Monopoles ne sont plus sous la détermination de la " propriété privée " et plus sous celle de " L'Etat - Nation ", dans quel système sommes-nous ? Est-on déjà dans le socialisme ! !? Essayons " d'interpréter " ce que Trotski veut dire, action que nous devrons répéter plusieurs fois à la lecture de l'article. Trotski veut- il dire que le stade monopoliste se caractérisant par l'entreprise par actions, nous entrerions dans une ère nouvelle différente du stade concurrentiel, période où le petit ou moyen propriétaire dominaient, cela est vrai, mais en quoi cette nouvelle phase nie la propriété privée ? N'est-ce pas au contraire un formidable renforcement de sa prégnance et de son extension, Ceci à l'égard de catégories qui jusque là n'étaient pas atteintes par un tel phénomène, avec le stade de l'actionnariat de millions de petits porteurs. Même si le petit porteur tend plus vers l'épargnant que vers le manager, il joue un rôle fondamental dans la reproduction de la basse de masse idéologique et politique du capitalisme. Il ne veut pas de la nationalisation, il ne veut pas de l'abolition de la propriété privée des moyens de production. Il exige (aujourd'hui surtout) des retours sur investissements qui sont supérieurs à ce que tout manageur sait pouvoir produire (voir l'action des Fonds de Pension). Dans l'exploitation, les petits porteurs sont souvent les plus féroces, ils ne peuvent donc pas être exemptés de l'extension du capitalisme.

Seconde incohérence " …et les limites de l'Etat national " à bon ! ?, le capitalisme 'monopoleur' est sans statut juridique, sans forme nationale d'expression ? Quel économiste, même trotskiste, peut nous citer une entreprise qui, de part le monde, échappe au juridisme bourgeois et à son expression de territorialité dans l'Etat - nation. Ces entreprises n'ont elles pas une maison mère où le siège soit situé, un lieu bien réel, physiquement repérable, de concentration du pouvoir et de rapatriement des capitaux en cas de crise (même s'il s'agit de paradis fiscaux extra- territoriaux cela ne change rien à l'affaire, ils ont tous une planque) ?

 

Comprenne qui pourra, plus exactement commençons à comprendre que pour pouvoir introduire sa conception très particulière qu'il a des " forces productives " et de leur prétendu rôle progressiste dans l'histoire, Trotski a besoin de mettre en place une conception très éthérée , " a - historique ", " a - juridique ", naturalisée et scientisisée, de ce qu'il appelle " les forces productives ".



- " Les forces productives se heurtent aux cloisons de la propriété privée et des frontières nationales "

- " Les Etats bourgeois sont contraints (?) de réprimer la révolte ( ?) des forces productives à l'aide du poing policier " Trotski.

 

Là, on touche le fond de la bouillie idéologique du trotskisme, les forces productives se heurtent aux cloisons de la propriété privée ? Si cela était le cas, alors pourquoi ne se sont-elles pas étendues historiquement sous formes de propriétés publiques dans le cadre du capitalisme transnational mondial (par opposition au capitalisme d'Etat) cela aurait résolu la question des frontières. Réciproquement, pourquoi le capitalisme a-t-il éprouvé le besoin de privatiser, pour internationaliser, si la propriété privée est une prison produit du cadre national ? Quel est le statut des rapports de production dans l'extension des forces productives de l'univers imaginaire de Trotski.

L'Etat réprime la " révolte " des forces productives ? Les moyens de travail se révoltent ? Les objets de travail ? Comment ? Avec leurs petits bras musclés ? Contre qui et pourquoi ? Ne sont-elles pas le résultat du développement du capitalisme ? Un capitalisme " si progressiste " que Trotski s'oppose à tout ce qui pourrait lui faire barrage, en particulier le capitalisme d'Etat ?

 

On a le sentiment que Trotski conçoit l'économie comme un système qui se développe hors son expression superstructurelle, qui aide à sa mise en œuvre l'encadre et le reproduit. Il y a d'un côté l'économie, les forces productives et de l'autre une superstructure, où doivent se situer les rapports de production. La première est littéralement " victime " de la seconde. Elle en est " prisonnière ", Le capitalisme comme expression juridique devient un " vol " un rapt d'un surproduit injustement détourné. Si on laissait les forces productrices " libre " du " poing policier " de la superstructure capitaliste, enfin elles pourraient respirer. On est en plein " économisme " c'est à dire dans cette fiction idéologique créée par les partisans de l'économie naturelle, pure émanation de la société civile. Là l'Etat, le     " méchant " Etat, apparaît comme une machine extérieure qui cherche à contraindre et réprimer des forces qui ne peuvent exister qu'en s'opposant à lui.
Cependant l'histoire réelle du capitalisme ne prouve-t'elle pas au contraire, qu'il en est essentiellement l'organisateur. C'est lui L'Etat qui institue le sujet de " droit ", codifie et sanctifie la propriété privée par sa police et sa justice, organise la circulation des marchandises en les validant socialement par la monnaie unique (banque centrale), s'attaque ou au contraire organise l'extension des monopoles, aide à la recherche scientifique et technique si nécessaire aux forces productives, et pour finir aide à la pérennisation du marché en surveillant son bon équilibre.

 

" Si a l'époque de l'ascension du capitalisme, à laquelle la guerre mit fin " Trotski.



Ici aussi Trotski développe un point de vue pour le moins singulier, la guerre a mis fin au développement du capitalisme ? Sûrement pas. Ni au capitalisme d'Etat (que Trotski juge désormais unilatéralement réactionnaire) ni à la concentration capitaliste privé avec le renforcement des trusts enrichis par la guerre et par le développement des forces productives de même nature, quant à la création de l'URSS, elle n'a absolument pas bloqué à l'échelle mondiale une telle réalité.

Les guerres sont un formidable accélérateur et amplificateur du développement des forces productives, de la division du travail, de la recherche et des découvertes scientifiques (gaz, atomes etc.).

 

Pour les 2 dernières guerres, la division du travail, l'extension sans précédent du taylorisme et fordisme à la production de séries font de la guerre, un stade historique de concentration de forces productives capitalistes inusité.
Mais ce n'est pas cela que Trotski veut dire. Trotski porte sur les forces productives un regard kantien d'impératif catégorique, les forces productives sont " progressistes ", la guerre étant régressive, détruisant les forces productives, elle les ferait stagner, ou les détournerait de leur mission (Lesquelles ? La satisfaction des besoins humains ?) Où a t'il été chercher cela ? Depuis quand le marxisme a t'il affirmé que le capitalisme avait pour mission de satisfaire les besoins, ou qu'il se préoccupe du développement, le capitalisme au contraire n'a t'il pas pour mission de satisfaire uniquement le profit ?

La guerre n'est elle pas le moyen par lequel celui-ci connaît un développement inégalé. D'autre part, si on s'intéresse à ce qui c'est réellement passé, à la suite des grandes guerres, le développement chemins de fer grâce à la guerre de1870, celui de l'automobile grâce à celle de 14-18, la reconversion (déjà intégrée à leur conception) des bateaux de guerre peu chers (Liberty- sheep), de la seconde guerre mondiale qui vont faire exploser la circulation des marchandises du plan Marshall (qui soit dit en passant est une formidable démonstration de l'utilisation du capitalisme d'Etat (Etatsunien) au profit des intérêts privés), la production des avions de transports militaires reconvertis ( dont le célèbre B 17) qui vont développer l'aviation civile de masse etc. etc.

Essayons quand même de sauver quelque chose de tout cela, Trotski écrit son article en 1929, c'est à dire à un moment où le fascisme monte. Emporté par son antifascisme, il applique à son expression particulière de capitalisme d'Etat, un jugement qui porte sur toutes ses formes historiques. Désormais pour lui ce stade ne peut être que réactionnaire. Est-ce justifié ?

Trotski a raison de constater que le capitalisme d'Etat fasciste est sans doute le moyen par lequel une fraction de la bourgeoisie tente de contrôler et de contrecarrer, l'universalisation du capitalisme à son profit. Il voit dans la volonté d'empêcher le développement " naturel " des forces productives, une tendance réactionnaire conservatrice, ou au moins une tendance qui s'oppose au point de vue marxiste des origines, qui faisait de cette même universalisation une phase progressiste. C'est là ou la discussion s'impose et où la limite de sa pensée devient évidente.
Par rapport à Lénine, il y a déjà une divergence frontale. Lénine juge le stade impérialiste, c'est à dire le stade de l'exportation du capital comme une phase réactionnaire, Lénine dénonce la conquête économique des peuples, leur perte d'indépendance nationale, l'introduction d'un néocolonialisme, par l'extension du capitalisme, pas Trotski.

 

C'est tout le contraire, sa fameuse phrase " Les forces productives vont voler en éclats les " Etats- nations "", est une évidence, si on entend par cette expression " les forces productives sous le capitalisme ", car les forces productives du camp socialiste n'ont jamais fait voler en éclat quoi que ce soit. Ce qui prouve que se ne sont pas les forces productives qui modifient la nature des Etats, mais les rapports de production, surtout les rapports de propriété. Et c'est pourquoi le capitalisme privatise, il privatise pour internationaliser, le capitalisme ne veut pas de formes publiques d'autres Etats, dans une formation sociale donnée, car il y a risque de conflits d'intérêts entre Etats (Ce que le colonialisme à permis, domination de formes publiques dans un Etat étranger), avec un ou des particuliers ce n'est pas la même chose, ils doivent se soumettre à la puissance publique au nom de sa souveraineté.

 

Cette assertion, mal rédigée par Trotski, devient chez lui un concept Kantien contenant un impératif catégorique : le " progrès " des forces productives    ( capitaliste ?), serait une " bonne " chose, puisque cela nous aide à résoudre la question de l'Etat.
C'est une première erreur, qui n'est pas selon nous, une volonté manifeste de sa part mais qui tient beaucoup plus à la vision complètement idéaliste qu'il a de ces dernières. Les forces productives sont pour lui un deus ex machina, qui contiennent en elles-mêmes les contradictions du mode de production et par elles-mêmes, les moyens de les résoudre.



" Le capitalisme d'Etat aspire à arracher l'économie à la Division Internationale du Travail. ( ?) " Trotski.


La D.I.T est une bonne chose ? Nouvelle surprenante, le capitalisme d'Etat aspire à l'arracher ? Cela dépend lequel, celui que veulent construire les forces révolutionnaires sûrement, celui qu'impose le fascisme peut-être (mais il ne sert pas les mêmes intérêts) celui qui s'imposera à la surface de la terre lors du compromis réformiste d'après guerre (Capitalisme Monopoliste d'Etat) certainement pas,

 

C'est tout le contraire. En prenant en charge, la part la moins rentable du capital sous la forme de nationalisations publiques, les forces capitalistes mondiales vont favoriser une extension du capitalisme sans commune mesure avec ce qui existait avant guerre, ce sont les 30 glorieuses d'après guerre.

A l'opposé de cette analyse, avec Lénine, on est en droit de penser que depuis le passage au stade monopolistique et son extension impérialiste au reste du monde, par leur nature capitaliste, les forces productives du capitalisme monopoleur, ne jouent plus de rôle progressiste, que par conséquent, le capitalisme d'Etat, les nationalisations, la planification, l'aménagement du territoire, jouent un rôle contra-cyclique de défense des peuples notamment parmi les nations dominées, au moyen du renforcement de l'action de l'Etat - Nation.

N'en déplaise à Trotski en affirmant qu'avec Lénine, la Gauche Communiste juge que le Capitalisme d'Etat est une phase obligée, et présente donc par là même, un caractère " progressiste ", Urbahns est beaucoup plus près de Lénine que Trotski.

 

" En commençant par les douanes du type de celle de l'ancienne Chine et finissant aux épisodes d'interdiction des machines dans " l'économie planifiée " de Hitler. Parvient à une régulation instable aux prix de l'abaissement de l'économie nationale (?) "Trotski.

 

Là aussi Trotski, nous surprend par l'interprétation des faits historiques, l'institution de droits de douanes, a été le moyen par lequel, de nombreux Etats capitalistes ont permis le démarrage de leur industrie et le moyen par lequel ils ont pu développer leur pays (C'est ce que les historiens du développement du capitalisme ont démontré, c'est en se protégeant derrière des barrières douanières, que l'Angleterre, puis les U.S.A ont forgé leur puissance avant d'aller à la conquête du monde ( théorie du Take - Off, mise en avant par les économistes du démarrage économique). Hitler aurait abaissé l'économie allemande en se protégeant ? N'est-ce pas l'inverse qui c'est passé, n'est-ce pas une formidable machine guerre aux forces productives surmultipliées qui s'est dressée face aux peuples d'Europe ? N'a t'il pas fallu que les américains développent à leur tour, la toute la puissance de leurs propres forces productives, pour en venir à bout, qu'ils développent une formidable machine de guerre portant leur industrie, leur commerce, leur puissance financière à des niveaux inusités jusqu'à lors. Tout ce que spontanément le système, même mondialisé, livré à lui même, n'avait pas été capable de réaliser à l'époque.

" L'introduction du chaos dans les relations internationales et d'un désarroi complet du système monétaire, dont on aura bien besoin pour la planification socialiste (?) " Trotski.



Trotski, le révolutionnaire, s'inquiète des relations internationales, lesquelles ? Du système monétaire, lequel ? C'est avec des relations internationales capitalistes et un système monétaire de même nature que Trotski envisage de construire la " planification " socialiste ? Là encore, la planification n'est elle pas concomitante d'une régulation étatique publique ? D'où sort cette planification, sinon de la tête de Trotski s'entourant d'institutions éthérées " transnationales " pratiquant des relations de mêmes natures,  à l'image des forces productives "a - capitalistes" que Trotski nous a imaginées.

La conception que Trotski développe de l'économie n'est pas sans nous rappeler l'économie fiction développée dans les œuvres de David Ricardo. La monnaie par exemple, une monnaie sans liens réels avec les rapports sociaux de production. Mais aussi des échanges internationaux, basés sur des coûts comparatifs "a-historicisés".

Une histoire drolatique résume bien la réalité de l'économie 'fiction' bourgeoise. Dans le cadre de sa démonstration justifiant les échanges internationaux, Ricardo conseille aux portugais de se spécialiser dans le vin, car le Portugal est un pays où l'on peut faire naturellement du vin, à l'opposé les anglais eux se spécialiseraient dans le drap par ce que les anglais ont dans ce domaine une expérience certaine. Sauf que cette charmante histoire, que l'on continue d'enseigner dans les meilleures universités et les organismes internationaux, nie au moins 3 choses ayant rapport avec l'Histoire réelle. L'Histoire réelle, c'est que l'Angleterre dominante avait à l'époque tout intérêt au commerce, le Portugal dominé peut-être moins. Le Portugal, l'avait d'autant moins que technologiquement le drap était beaucoup plus producteur de sciences, d'industries et de techniques que le vin. En choisissant ce types de produits et de spécialisations, Ricardo n'intervenait donc pas au hasard de relations internationales et d'une D.I.T " naturelle ", tel que nous les envisage, notre " innocent " Trotski. Le plus drôle pourtant n'est pas là, le plus drôle, c'est que ce tour de passe - passe ne changeait rien à l'affaire, " aux affaires ", car il faut savoir que la majorité des vignobles portugais étaient déjà à l'époque propriétés des anglais, les anglais raffolant du Porto, on peut encore voir dans certains chais des plus anciens domaines, leurs marques sur d'anciens tonneaux, on prétend que sur certains d'entre eux est encore écrit le nom d'un richissime négociant, qui a fait fortune dans les céréales après avoir fait baisser les droit de douanes anglaises les fameuses Corn-Laws, un certain David Ricardo, celui-ci en ruinant l'agriculture anglaise, à de façon concomitante ruiné la classe laborieuse anglaise, et permis l'explosion des profits de l'impérialisme britannique (ce qui fait que la classe ouvrière britannique est aujourd'hui structurellement liée au pillage inter-impérialiste, notamment du Commonwealth, devenu essentiel à la reproduction de sa force de travail par des produits agricoles à bas coûts : africains, indiens, océaniens ).

 

Notre " innocent " Trotski est à l'image de cette historiette, incapable de comprendre la nature du capitalisme, car incapable de comprendre la relation quo-substantielle que la bourgeoisie entretien avec la division du travail, qu'elle soit technique et / ou sociale.

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